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Actionnariat salarié : trop complexe ? Faux prétexte !

Publié par Linda Labidi le | Mis à jour le

Changement de paradigme pour les dirigeants : longtemps perçu comme un outil réservé aux grands groupes, l'actionnariat salarié s'impose désormais comme un puissant levier de performance pour les PME et startups. Comment le mettre en place sans se tromper ? Quels sont les écueils à éviter ? Entretien avec Stéphane Buffa, avocat fiscaliste et associé gérant chez KAIRNS Avocats.

Dans un contexte de guerre des talents et de quête de sens au travail, les dirigeants sont de plus en plus nombreux à envisager des dispositifs d'actionnariat salarié. Objectif : impliquer les collaborateurs dans la réussite de l'entreprise tout en renforçant leur fidélité. Encore faut-il bien en comprendre les enjeux juridiques, fiscaux et managériaux. Stéphane Buffa nous éclaire.

En quoi consiste exactement l'actionnariat salarié ?

C'est un dispositif qui permet à des salariés d'entrer au capital de leur entreprise. Autrement dit, ils deviennent associés, avec tous les droits et potentiels gains que cela implique. Ce mécanisme incarne une convergence entre le capital et le travail : les salariés sont à la fois acteurs du quotidien et bénéficiaires directs de la création de valeur.

Pourquoi un dirigeant de PME ou de startup devrait-il s'y intéresser aujourd'hui ?

Parce que c'est un formidable outil d'alignement des intérêts. Les dirigeants y trouvent un levier fort pour motiver leurs équipes, retenir les talents clés et embarquer tout le monde dans une dynamique de croissance. Pour les salariés, c'est la possibilité de toucher une part des fruits de l'aventure entrepreneuriale, avec souvent une fiscalité bien plus avantageuse qu'une prime ou un bonus.

Quels sont les dispositifs les plus courants ?

On distingue plusieurs outils, à choisir selon la maturité de l'entreprise :

  • Les BSPCE (bons de souscription de parts de créateur d'entreprise) : réservés aux entreprises de moins de 15 ans, ils sont très populaires dans les startups.
  • Les actions gratuites : plus souples, elles sont accessibles à un plus large spectre d'entreprises.
  • Les actions de préférence : souvent utilisées dans des contextes de transmission ou de LBO.
  • Dans tous les cas, il s'agit de transférer du capital, que ce soit à titre gratuit ou onéreux, à des collaborateurs sélectionnés. C'est un acte stratégique.

    À quel moment de la vie d'une entreprise faut-il envisager de mettre en place un tel dispositif ?

    Il n'y a pas de moment unique. Les startups y pensent dès les premières levées de fonds. Les PME plus établies peuvent y recourir pour fidéliser les talents ou préparer une transmission. Ce qui compte, c'est la cohérence avec les objectifs stratégiques de l'entreprise. L'actionnariat salarié n'est pas une fin en soi, mais un moyen au service d'une ambition.

    Est-ce que le cadre juridique et fiscal est désormais plus sécurisé ?

    Oui, et c'est une excellente nouvelle. La loi de finances 2025 a renforcé la sécurité juridique de ces dispositifs. Elle clarifie les critères d'éligibilité et sécurise le traitement fiscal : pour les salariés, une imposition au titre des revenus du capital via la flat tax ; pour l'entreprise, une quasi-absence de charges sociales. C'est un cadre désormais stable et attractif.

    Quels sont les pièges à éviter ?

    Le principal danger, c'est de se lancer sans vision claire. Il ne faut pas céder à un effet de mode. Un autre écueil fréquent, c'est la complexité excessive : trop de dispositifs, mal expliqués, peuvent générer de la confusion ou des frustrations. Et bien sûr, il faut impérativement un encadrement juridique solide. Un salarié associé doit être considéré comme tel : droits de vote, conditions de sortie, clauses spécifiques... tout doit être défini en amont.

    Finalement, que diriez-vous à un dirigeant qui hésite encore ?

    Je lui dirais que l'actionnariat salarié n'est pas un gadget RH. C'est un vrai outil stratégique, qui transforme la culture de l'entreprise. C'est aussi un message fort envoyé aux équipes : « Vous faites partie de l'histoire, vous êtes des partenaires ». Dans un contexte où la fidélisation et l'engagement sont des enjeux majeurs, c'est une carte à jouer sérieusement.