Loi santé au travail : quels changements depuis le 31 mars 2022 ?
Publié par Benoit Sevillia et Aliénor du Foussat, Drouot avocats le - mis à jour à
La loi d'août 2021 pour renforcer la prévention de la santé au travail est entrée en vigueur le jeudi 31 mars 2022. Elle a créé, pour les employeurs, de nouvelles obligations.
La révision de la loi santé au travail met en avant deux grands chantiers de rénovation : le renfort de la prévention des risques professionnels(1) et le suivi médical des salariés(2). Tour d'horizon des principales dispositions.
Le renfort de la prévention des risques professionnels
La loi du 2 août 2021 a créé une série de mesure venant renforcer les moyens mis en oeuvre pour prévenir les risques professionnels au sein de l'entreprise :
Elargissement de l'obligation d'évaluation des risques professionnels
Il est désormais mis à la charge des entreprises l'obligation d'évaluer les risques pesant sur le travailleur du fait de l'organisation du travail, en collaboration avec le CSE ou la CSSCT, les responsables préventions ou les services de prévention des CPAM ou des SSTI(1).
En parallèle, le document unique d'évaluation des risques professionnels (Duerp) devra également assurer la traçabilité collective des expositions aux risques (c'est-à-dire que ses versions successives devront être gardées) et être conservé 40 ans sur un portable dématérialisé (2).
Dans les entreprises de plus de 50 salariés, l'employeur devra désormais en déduire un programme annuel de prévention des risques professionnel sur lequel le CSE devra être consulté(3).
Enfin, la loi du 2 août 2021 vient aligner sa définition du harcèlement sexuel sur celle du Code pénal et met l'accent sur la notion de polyexposition permettant d'inclure dans le champ de la prévention des risques les expositions simultanées à certains risques (chimique et acoustique entre autres).
Obligation de négociation sur l'égalité professionnelle et les conditions de travail
Dans les entreprises dotées de sections syndicales d'organisations représentatives, il appartiendra à l'employeur d'engager une négociation au moins tous les 4 ans sur l'égalité professionnelle femme-homme et sur la qualité de vie et les conditions de travail(4).
Formation des représentants du personnel à la santé et la sécurité au travail
Les membres du CSE devront bénéficier d'une formation de 5 jours en matière de santé, sécurité et conditions de travail en cas de premier mandat. Cette formation est réduite à 3 jours en cas de renouvellement du mandat des membres du CSE mais est maintenue à 5 jours pour les membres de la CSSCT des entreprises de plus de 300 salariés(5).
Les frais de formation pourront être prises en charge par des opérateurs de compétence, organismes chargés d'accompagner la formation professionnelle dans les entreprises de moins de 50 salariés dans la limite du coût horaire du Smic par heure de formation.
Mise en place d'un passeport de prévention recensant les formations des salariés
Au plus tard à compter du samedi 1er octobre 2022, l'employeur devra élaborer un document recensant, par salarié, les qualifications acquises par le travailleur via des formations santé et sécurité au travail(6).
Le suivi médical des travailleurs
La loi du 2 août 2021 a également donné naissance à un arsenal de mesures visant à améliorer le suivi médical des salariés.
Nouvelle dénomination du service de santé au travail qui met l'accent sur la prévention
Désormais, le suivi des salariés sera assuré par « le service de prévention et de santé au travail » (SPST), soulignant l'intention du législateur de rendre le service de santé acteur de la prévention.
D'une manière générale, les SPST ont pour mission d'éviter toute altération de la santé des salariés du fait de leur travail.
En application du nouvel article L 4622-2 du Code du travail, les SPST contribuent à la préservation d'un état de santé des travailleurs compatible avec leur maintien en emploi tout au long de leur vie professionnelle.
Digitalisation du suivi médical des salariés
Le suivi médical des salariés pourra désormais se faire à distance, en téléconsultation(7). En outre, le médecin du travail pourra désormais accéder au dossier médical partagé des salariés s'ils donnent leur consentement(8).
Nouvelles visites médicales pour le service de prévention et de santé au travail
Une visite médicale de mi-carrière devra être organisée à une échéance déterminée par un accord de branche, à défaut au 45e anniversaire du salarié, ou conjointement à toute autre visite médicale ayant lieu dans les 2 ans précédant cette échéance.
Ses objectifs sont de lutter contre les risques de désinsertion professionnelle, sensibiliser aux enjeux du vieillissement et prévenir les risques professionnels(9).
En parallèle, le salarié en arrêt maladie longue durée pourra rencontrer son employeur en lien avec le service de prévention et de santé au travail, au cours d'un rendez-vous de liaison facultatif, afin d'envisager sa reprise et lutter contre la désinsertion professionnelle(10).
Si certaines mesures alourdissent les obligations mises à la charge de l'employeur, le renforcement de la prévention à laquelle les représentants du personnel sont associés, l'amélioration de la formation et la modernisation du suivi médical des salariés, elles optimisent et offrent une véritable transparence les outils de protection de la santé des salariés dans l'entreprise.
Pour en savoir plus
Benoit Sevillia, avocat associé, Drouot avocats, membre d'Avosial. Fondée en 2004, Avosial est une association composée d'avocats qui consacrent leur activité professionnelle à la représentation en justice et au conseil des employeurs dans le domaine du droit du travail et de la sécurité sociale.
Aliénor du Foussat, avocat, Drouot avocats
1- article L. 4121-3
2- article L. 4121-3-1
3- article L. 4121-3-1
4- article L. 2242-1
5- article L. 2315-18
6- article L. 4141-5 alinéa 1 du code du travail
7- article L. 4624-1
8- article L.4624-8 et suivants
9- article L. 4624-2-1
10- Article L. 1226-1-3