Fusion d'entreprise : comment bien anticiper cette opération ?
Publié par Linda Labidi le - mis à jour à
Chaque année en France, des centaines d'entreprises réalisent une opération de fusion. L'année 2023 a été marquée par des fusions significatives tels que le rapprochement de la Société Générale et du Crédit du Nord.
Sans avoir cet écho médiatique, une part importante des fusions sont menées par des groupes de PME. Le dirigeant d'une PME trouvera, dans cette opération complexe, un levier de gain de performance, de parts de marchés mais également une opportunité de mutualisation des coûts.
Bien qu'offrant des opportunités significatives, les fusions nécessitent une anticipation afin d'en assurer le succès. Les aspects juridiques, fiscaux, sociaux et comptables jouent un rôle essentiel.
Anticiper et lever les freins juridiques
D'un point de vue juridique, de nombreuses diligences préalables sont à réaliser :
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Appréhender le transfert des obligations sociales
Les contrats de travail en cours d'exécution à la date de la fusion se poursuivent avec le nouvel employeur (article L. 1224-1 du code du travail). Ce transfère implique :
Néanmoins, la fusion entraine la mise en cause automatique des conventions et accords collectifs applicables à la société absorbée. En d'autres termes, ces accords vont cesser de s'appliquer après un délai de survie de 15 mois maximum. Aussi, une phase de négociation va donc s'ouvrir afin d'adapter ou substituer les accords d'entreprises.
Optimiser l'impact fiscal via le régime de faveur
La fusion entraîne, pour la société absorbée, toutes les conséquences fiscales d'une cessation totale d'entreprise. Aussi, l'ensemble des bénéfices non encore taxés seront immédiatement imposés, y compris les plus-values réalisées à cette occasion.
Néanmoins, il existe un régime optionnel, le régime de faveur, visant à assurer la neutralité fiscale de l'opération. Le bénéfice du régime de faveur est soumis au respect de nombreuses conditions : aussi bien en termes d'engagements de la société absorbante que d'obligations déclaratives.
Par ailleurs, il arrive fréquemment que la société absorbée ait accumulé des déficits fiscaux reportables. En principe, ces déficits ne peuvent pas être imputés sur les résultats de la société absorbante.
Le régime de faveur offre la possibilité de transférer les déficits fiscaux reportables. Il est de droit pour les transferts inférieurs à 200 000 €. Au-delà, il est soumis à l'obtention d'un agrément préalable délivré par l'administration fiscale.
Ce régime de faveur mérite donc d'être analysé avec attention dans la mesure où il comporte différents avantages, non seulement en matière d'impôt sur les sociétés que de droits d'enregistrement.
Mesurer l'impact comptable chez la société absorbante
La fusion se traduit dans les comptes de la société absorbante en 3 étapes.
L'augmentation de capital : les associés de la société absorbée vont échanger leurs titres contre des actions de la société absorbante. A ce titre, il convient de réaliser une évaluation des deux sociétés afin de déterminer la parité d'échange. Une attention particulière devra donc être portée à l'effet dilutif de l'opération pour les associés de la société absorbante.
L'enregistrement de l'actif net reçu : l'ensemble des actifs et passifs de la société absorbée, hors comptes de capitaux propres, seront inscrits au bilan de la société absorbante. Cet enregistrement se fait à la valeur comptable, sauf exceptions.
En contrepartie, les titres de la société absorbée seront soldés de l'actif de la société absorbante. Il en découlera la constatation d'un boni ou mali de fusion.
Le boni de fusion correspond à l'écart positif entre l'actif net reçu par l'entité absorbante et la valeur comptable de cette participation. Cette plus-value est, sauf exceptions, enregistrée en résultat financier. L'option fiscale pour le régime de faveur permet de l'exonérer d'impôt.
Dans le cas inverse, un mali de fusion est constaté. Une partie de ce mali n'affectera pas le compte de résultat de la société. Il s'agit du mali technique correspondant aux plus-values latente sur les actifs comptabilisés ou le fonds de commerce. Néanmoins, « le vrai mali » correspondant à un complément de dépréciation des titres abondera les charges financières.
En conclusion, la réussite d'une fusion s'inscrit dans l'anticipation, le chiffrage des conséquences juridiques, fiscales, sociales et comptables. Ce travail préparatoire permettra au chef d'entreprise de prendre une décision éclairée mais également de préparer la rédaction du traité de fusion.
Benjamin Gobeaut est expert-comptable, commissaire aux comptes et associé au sein d'ORCOM, entreprise française indépendante de référence en expertise comptable, audit et conseil. Benjamin est spécialisé dans l'accompagnement des groupes de sociétés, il répond en particulier aux besoins spécifiques des entreprises évoluant dans des environnements complexes et diversifiés.