[Tribune] François Asselin : "L'ubérisation de l'économie doit être régulée"
Publié par François Asselin, président de la CGPME le | Mis à jour le
Pour François Asselin, président de la CGPME, l'ubérisation de l'économie doit être regulée par des règles appliquées par tous. A défaut, c'est notre modèle du "vivre ensemble" qui est menacé.
Le digital, c'est génial ! Néanmoins tout génial que ce soit, c'est un moyen et non une fin.
Cette nouvelle façon moderne et sympathique d'organiser le troc du XXIe siècle est certes un formidable moyen de booster les échanges et de bousculer l'ordre établi, mais doit-il pour autant être le nouveau modèle d'organisation sociétale ?
Échapper à la réglementation, à la TVA, aux charges sociales et autres prélèvements est un fantasme partagé par plus d'un Français, mais reconnaissons que tout modèle économique sans régulation et redistribution conduit à la loi de la jungle. D'ailleurs un des problèmes majeurs de nos amis grecs n'était-il pas le recouvrement de l'impôt et l'évasion fiscale ?
On argumente que cela permet aujourd'hui à certains d'avoir un revenu et à d'autres de le compléter. Imaginons la réussite totale de ce nouveau moyen d'échanges sans régulation et redistribution. La fiche de paie deviendrait un doux souvenir, mais la couverture sociale et les Assedic aussi ! Gageons aussi que nos infrastructures développées et entretenues grâce à nos impôts se verraient vite dans un tel état d'abandon, qu'une voiture Uber aurait du mal à circuler et que trouver l'adresse de l'appartement réservé sur Airbnb ne pourrait se faire après le coucher du soleil qu'avec l'aide de la lampe torche du smartphone à condition d'avoir pu le recharger sur le réseau public.
Bref, l'organisation d'une société et le "vivre ensemble" sont un bien commun qui ne peut exister que si des règles justement communes sont respectées.
Le progrès est en marche et va très vite. L'arrêter serait illusoire et utopique. Faisons en sorte de l'accompagner sans le freiner mais en le régulant. Il faut appliquer des règles qui puissent répondre au refus tout à fait compréhensible de voir arriver une concurrence déloyale et à la légitimité tout aussi normale d'accepter une nouvelle forme d'échanges. C'est à cette condition que la menace se transformera en opportunité et que l'économie traditionnelle sera positivement "bousculée" pour s'adapter. À nous d'anticiper. D'autres pays et des plus libéraux s'y mettent. En ce domaine nous savons être souvent très créatifs. Alors qu'attendons-nous ?
François Asselin
Président de la CGPME depuis janvier 2015, François Asselin a été président de la CGPME Deux-Sèvres, de la CGPME Poitou-Charentes et vice-président de la Fédération Française du Bâtiment. Il dirige l'entreprise Asselin SAS, 140 salariés, spécialisée dans la charpente, la menuiserie, l'ébénisterie et la ferronnerie d'art, basée à Thouars.